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Zones défavorisées La nouvelle carte ne fait pas que des heureux

Manifestation à Rodez. © Twitter/FDSEA 12

Une réunion nationale sur la réforme des zones défavorisées simples se tenait ce 9 février en présence du ministre. La nouvelle carte réintègre une grande partie de l’Occitanie, mais éjecte d’autres territoires.

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Comme promis après la réunion technique du 26 janvier 2018, le ministère de l’Agriculture a retravaillé sa proposition de carte des nouvelles zones défavorisées simples. La nouvelle proposition dévoilée vendredi, en présence cette fois du ministre, classe 13 984 communes (au lieu de 10 477 actuellement), pour 59 373 bénéficiaires (au lieu de 53 074 actuellement). En faisant, forcément, des gagnants et des perdants.

L’affinage des critères et curseurs pour le classement a fait bouger les lignes des zones soumises à contraintes spécifiques (ZSCS). Celles-ci constituent la dernière couche du zonage (la seule sur laquelle l’État a une vraie marge de manœuvre), après la couche « montagne » qui reste inchangée, et la couche ZSCN ou « zones soumises à contraintes naturelles » basée sur des critères biophysiques européens. Résultat de ces derniers travaux : une bonne partie de l’Occitanie réintègre le zonage. Corollaire : d’autres territoires en sortent, afin de rester sous le plafond réglementaire des 10 % au maximum de la SAU nationale classée en ZSCS.

Des perdants dans la Région Centre

« En Centre-Val de Loire, on a reperdu une centaine de communes par rapport à la carte présentée à la fin de décembre », indique Étienne Gangneron, éleveur dans le Cher, qui représentait la FNSEA à cette réunion. Certes, sur un plan comptable, le compte y est, puisque la Région garde 640 communes classées, comme c’est le cas actuellement.

« Mais des territoires fragiles, où l’élevage est présent, sortent du zonage alors qu’on intègre des communes qui n’ont rien à y faire… » dénonce-t-il. Concrètement, la Sologne du Loir-et-Cher est « sauvée », mais pas celle du Loiret, et le Pays-Fort (Cher) et l’Indre-et-Loire sont sévèrement impactés. À peine reçue la mauvaise nouvelle, les agriculteurs ont décidé de reprendre la mobilisation dans la région.

L’Occitanie en partie sauvée

L’Occitanie récupère de nombreux territoires, grâce au critère combiné « haies + petites parcelles », qui remplace désormais le critère « haies » simple. « C’est le grand gagnant parce qu’il était très impacté et qu’il a bougé syndicalement », analyse la Coordination rurale. Mais toute la région n’est pas sortie d’affaires et des manifestations reprenaient vendredi après-midi dans l’Aude.

« Pratiquement toute l’Occitanie pourrait être récupérée grâce au critère “continuité territoriale”, qui permet de boucher les trous entre plusieurs zones classées », indique cependant Yohann Barbe, élu (JA) en charge du dossier. Avantage de ce critère : il ne conduit pas à faire entrer des territoires non visés dans le classement, donc présente peu de risques de faire dépasser le plafond des 10 %. « Mais le ministère attend un feu vert de Bruxelles pour l’activer. »

Les Deux-Sèvres laissées pour compte

Le département des Deux-Sèvres, qui avait reçu des signaux encourageants du ministère faisant suite à une réunion plus tôt dans la semaine, voit finalement sa situation inchangée. Tout le département, à l’exception du marais poitevin, est déclassé, soit une perte sèche pour 1 800 éleveurs. S’estimant « trahi », le syndicat majoritaire déplore que « la solution diplomatique et la concertation ne servent à rien avec un gouvernement qui ne connaît et reconnaît que le rapport de force ».

Frein réglementaire…

Pour réintégrer d’autres territoires d’élevage fragiles, la profession pousse pour bouger de nouveau quelques curseurs jugés trop stricts, notamment le critère économique basé sur la production brute standard (PBS). Mais le projet présenté ce jour classerait déjà 9,8 % de la SAU en ZSCS, laissant peu de marges de manœuvre. Les agriculteurs rétorquent qu’« il faut retravailler la couche ZSCN, basée sur les critères biophysiques, pour tenter de gagner un peu de marge de manœuvre sur les ZSCS, mais le gouvernement ne l’entend pas de cette oreille », regrette Étienne Gangneron.

… et budgétaire

« Le ministère se sent aussi bridé par le problème budgétaire, constate Yohann Barbe. Mais on ne peut pas caler une carte qui aura un impact pendant de nombreuses années, en fonction d’un budget qui est sur un pas de temps de deux ou trois ans : il faut gérer les choses les unes après les autres. Et au-delà de l’ICHN, le zonage impacte les aides JA et les aides à l’investissement ! »

Demande de délai

Alors que la carte doit être rendue le 15 février, selon les vœux du président Macron, la profession réclame un délai supplémentaire. « Ils nous font croire qu’il y a une urgence, mais il serait plus cohérent que l’ICHN soit calé sur le calendrier de la prochaine Pac », soupire Thierry Jacquot, en charge du dossier à la Confédération paysanne. Mais s’il paraît peu probable que la Commission reporte le calendrier de la réforme, les organisations professionnelles espèrent a minima que la validation de la carte française soit repoussée après le Salon de l’agriculture. Sinon, il pourrait y avoir du désordre…

Bérengère Lafeuille

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